Le travail c’est la santé !

450 – C’est le nombre de jours qui nous séparent de l’accident.

Il y en a eu des évolutions depuis, sur le plan médical, physique, mental, technique, administratif, personnel et aussi professionnel. J’envisage depuis quelques mois déjà, de reprendre une activité pour retrouver une vie “normale”. Laquelle et comment y parvenir ?

Évolutions

Depuis mon dernier post publié à l’occasion du premier anniversaire d’un tétraplégique, bien des choses ont évolué. Je m’excuse d’avance de ne pas avoir donné plus de nouvelles, plus tôt.
Après plus de 11 mois de rééducation intensive et quotidienne à la clinique de rééducation Saint-Martin à Marseille, dans laquelle j’ai récupéré de la mobilité et un semblant de force au niveau des bras (biceps). Mais aussi au niveau des épaules (deltoids antérieures, postérieure et latéral), du dos (trapèze), mais toujours pas de triceps, de poignet, de doigts, ou des membres inférieurs (pas très importants ceux là).
Je suis retourné à Hendaye, dans le Pays du jambon de Bayonne et du piment d’Espelette (Basque) .

Hendaye, le retour !

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Ce séjour à Hendaye, d’un peu moins d’un mois et demi, réalisé au mois de septembre, à été possible grâce à la presence de l’hôpital Marin et de ses équipes, qui appartiennent au groupe de l’Assistance Publique des Hôpitaux de Paris.
Un hôpital situé dans un cadre d’exception, face à l’océan, à quelques minutes seulement du centre ville et du possible lieu de travail, les roues dans l’eau et une “handi-plage” réservée au centre pendant la saison estivale. Un domaine comprenant un jardin immense à la pelouse parfaite, des promenades au milieu et en front de mer, ainsi qu’une dizaine de bâtiments, pouvant accueillir près de 300 patients aux pathologies lourdes et diverses, en particulier neurologiques. Quand j’y repense, j’ai parfois l’impression d’être un patient privilégié, moins touché, et d’avoir de la chance. Ce qui n’est pas faux, je ne suis « que » tétraplégique.

Un métier « adapté » au tétraplégique

Sur le lieu de l’accident, mais surtout là où j’effectuais mon stage de fin d’études, comme “assistant community-manager”.
Un metier nouveau, créé avec l’avènement des nouvelles technologies, d’internet, des smartphones, des tablettes et surtout des réseaux sociaux. L’objectif étant de fédérer et animer une communauté connectée autour d’une même passion, d’une même marque. Un métier que l’on exerce à 90% du temps devant un ordinateur ou un téléphone, à la seule condition qu’il y ai une connexion internet.

Une chance pour moi, qui suis très limité physiquement mais suffisamment mobile, pour utiliser ces mêmes outils au quotidien, pour dialoguer, échanger, apprendre, m’informer, créer…
J’aurais certainement eu plus de mal à me retourner “aussi facilement” et me remotiver si j’avais exercé un métier plus manuel avant l’accident. Si j’avais été peintre par exemple, je me serais mal vu à galérer pour repeindre une villa avec mes “bras en mousse”, ou ma langue…

Objectifs

Pourquoi vouloir travailler, alors que je pourrais toucher jusque 1150€/mois d’aides, peinard au soleil,  sans rien faire ?

Comme pour tout être humain, chacun souhaite devenir et vivre heureux, pour cela, comme le schematise la pyramide de Maslow, il est indispensable d’assouvir en priorité les besoins primaires ou physiologiques (manger, boire, dormir). Ensuite vient le besoin de sécurité, et enfin d’appartenance, avant d’obtenir de la reconnaissance pour s’accomplir.  C’est pourquoi après 11 mois, à trouver des solutions pour remplir les besoins primaire, il m’est indispensable de passer à autre chose, de travailler pour « appartenir » à un groupe, et ainsi continuer de gravir les échelons pour me rapprocher du sommet et tenter d’être heureux.

pyramide-maslow

Pyramide de Maslow

L’idée serait de reprendre une activité professionnelle chez Tribord / Nabaiji (appartenant au groupe Décathlon). L’entreprise, les marques passion, qui créent, développent et distribuent des produits destinés aux sports nautiques: plongée, sports de pagaies, sports de glisse, voile, et à la natation. Cela permettrait avant tout, de retrouver une vie sociale enrichissante, rencontrer des personnes, autres que dans un contexte hospitalier et faire avancer des projets ensemble.
Ma vie à été bouleversée par un malheureux accident de surf, en revanche, l’univers des sports d’eau me fascine toujours autant, tout comme l’envie d’évoluer dans cette industrie.
Alors, après 5 longues années d’études et l’obtention d’un Master 2 en communication, autant mettre en pratique les “théories apprises en cours”, et poursuivre l’acquisition de compétences pour rester compétitif et utile à l’entreprise ainsi qu’à la société.
Evoluer dans une entreprise qui innove constamment, avec des équipes jeunes, créatives, dynamiques et des valeurs humaines, permet de se fixer de nouveaux objectifs, surpasser les limites du handicap et pourquoi pas apporter un regard différent. Bien entendu l’objectif est également de devenir indépendant financièrement, même si au début, je risque de ramer avec un salaire de mi temps et un abattement des aides sociales. En travaillant, on gagne de l’argent, donc les aides sont réduites : logique. Mais si on gagne moins que ces dernières? « On l’a dans l’os ». Retour à la case départ sans toucher 20000 Francs. C’est balo.  

Les bases du projet professionnel

tribord-logo-blog

Etre à l’extérieur de la clinique st Martin pendant un mois, m’a permis de respirer de nouveau l’air frais de l’ocean, avoir de nouvelles perspectives, découvrir de nouvelles personnes, d’autres façon de travailler, d’autres organisations, et bien sûr de retourner chez Tribord.
L’occasion pour moi, de faire avancer mon projet professionnel, revoir mes anciens et probablement futurs “collaborateurs”, en particulier l’équipe communication, avec et pour qui je travaillais (en plus des consommateurs, ça va de soi ;).
L’organisation d’une réunion majeure avec le directeur communication, mon boss direct, un professeur spécialisé dans la réinsertion des blessés médullaires, mon docteur qui me suit à Hendaye ainsi que l’ergotherapeute, suivi d’une seconde avec tout le personnel de l’hôpital: professeur, medecin, ergotherapeute, infirmiers, aides soignants, psychologue, kinés et l’assistante sociale, pour débattre de mon avenir. Une étape capitale pour poser les bases de notre collaboration et ainsi faire connaître le handicap pour rassurer l’employeur. Évaluer les risques, les contraintes et les opportunités, puis préciser tout ce qu’il faut mettre en oeuvre, pour que ma réinsertion soit une réussite autant pour l’entreprise que pour moi.

Un projet de vie complexe

Ce projet étant “unique”, il n’existe pas de mode d’emploi, ni de bouquin “l’embauche des tétraplégique, pour les nuls ?”, nous avançons donc, un peu a l’aveugle, par tâtonnements, en croisant les expériences des uns et des autres.
Il n’est pas inutile de rappeler qu’avec ce handicap, je ne suis plus dans la situation du jeune diplômé, capable de sauter dans le premier avion, pour saisir une opportunité d’emploi à l’autre bout du monde. Mais plutôt celle du père de famille, avec des contraintes de mobilité (le job de madame, l’école des enfants, la copine de l’aîné….). Il n’est pas impossible de se déplacer loin, mais lorsque c’est nécessaire, une organisation complexe doit être mise en place pour y parvenir.

Pour faire aboutir au mieux ce projet, et avec l’objectif de réintègrer l’équipe au printemps 2016, nous avons établi le plan d’action suivant:

Aspects professionnels

  • Démarches administratives (demande RQTH)
  • Visite du médecin du travail
  • Aménagement du poste de travail
  • Horaires de travail (pour commencer)
  • Gestion des soins au travail
  • Aides techniques pour rester performant face aux “valides”
  • Contacts avec la mission handicap de l’entreprise
  • Contacts avec l’Association des Paralysés de France

Aspects personnels

  • Demande d’aides techniques (fauteuil roulant électrique, lit médicalisé, lève personnes…)
  • Demande d’aides humaines (quantifier le nombre d’heures en fonction des tâches)
  • Recherche de logement adapté
  • Gestion des soins (sondages…), contraintes médicales (kiné…) et impondérables de nuit
  • Régularisation du permis de conduire
  • Organiser la vie seul en appartement (avec les auxiliaires de vie, infirmiers, déplacements …)

Il est impératif que chaque tâche soit planifiée, quantifiée, tout en incluant des marges d’erreurs, pour éviter qu’un seul maillon défaillant, n’entraîne un dysfonctionnement général de la chaîne : retard au travail, sur les soins et éventuellement un impact sur ma santé.

Voilà, d’ici là, il me reste du pain sur la planche, mais de nombreuses évolutions ont déjà eu lieu ces dernières semaines, permettant de garder le sourire, le moral et donner de l’espoir !